«Etre famille d’accueil»: quand une telle maison n’est pas la un

Andre Lavoie

Au premier des dix episodes d’la serie documentaire Etre famille d’accueil, Nancy Audet deambule au milieu d’un petit village de l’Abitibi-Temiscamingue scinde par une route principale, la ou moyen semble suspendu. On pourrait aussi qualifier la zone de « tranquille et sans histoire ».

Pour de nombreux gens, sans doute, mais pour l’ancienne journaliste sportive du reseau TVA, l’endroit est chargede mauvais souvenirs, rempli de cris, de larmes et d’agressions de toutes sortes. D’ou votre petit tour de force obtenu via Mathieu Vachon, corealisateur de la serie avec Isabelle Tincler, d’avoir persuade Nancy Audet de se preter a une telle puissante introduction. Car le enfance et son adolescence furent marquees au fer rougepar une mere qui l’a detestee des l’accouchement et ne s’est jamais privee de lui faire savoir. Tous les revenus lui semblaient permis : l’enfermer dans sa chambre, la frapper, l’humilier devant la fratrie ou le voisinage, la confier a 1 predateur sexuel alors que les drapeaux rouges s’agitaient de toutes parts.

Nancy Audet relate cela avec une franchise desarmante au sein d’ Plus jamais J’ai honte. Le parcours improbable d’une petite poquee (Editions de l’Homme), recit bouleversant, choquant d’une enfant victime de maltraitance, victime aussi des silences plus ou moins complices de l’entourage. Certains ont bien tente de lui mettre secours, d’autres ont detourne le regard. « de nombreux gens rencontres Г©questres du village ont lu le livre », souligne Nancy Audet en entrevue au sein des bureaux de Sphere Media, qui a service la collection Etre famille d’accueil. « Beaucoup d’autres ont prefere ne pas le lire, ainsi, c’est reellement correct. Pour certaines individus, ca va etre confrontant ; un jour, si elles paraissent pretes… »

Raconter pour conscientiser

Depuis quelques annees, la journaliste qui possi?de egalement travaille a Radio-Canada reste prete a raconter son histoire a qui veut bien la lire ou l’entendre, serieusement secouee par la fond tragique d’une fillette de Granby en avril 2019. Car Nancy Audet a connu aussi le desarroi des enfants pris en charge par la Direction d’la protection de la jeunesse (DPJ), le sentiment d’arriver trop vite au milieu d’une famille d’accueil et dans une maison qui n’est pas la leur. Mais tout au long de ce parcours chaotique, douloureux, elle se souvient de chaque main tendue, de chaque commentaire d’encouragement ainsi que chaque enseignant, voisin, amie ou entraineur qui a su percevoir la detresse derriere sa facade de petite fille turbulente et effrayee.

Manque etonnant qu’elle soit aujourd’hui le c?ur et l’ame d’une serie en dix episodes cherchant a deconstruire bien des prejuges a l’egard de la DPJ, et surtout des familles d’accueil. Et aussi en se devoilant autant au niveau personnel, la demarche n’a rien de therapeutique, tient-elle a preciser. « Mon histoire, je veux la transformer en outil de conscientisation. Etant donne qu’il y a une meconnaissance enorme des sequelles que subissent nos enfants au Quebec en 2021. Vous pourrez lire le dernier rapport en DPJ, qui me fait mal : 118 000 signalements, 47 000 retenus parce que l’on pue pour l’integrite des enfants. Et 25 % des cas concernent des violences corporelles. On doit en parler, ainsi, trouver des solutions. J’ai d’ailleurs la conviction que nos solutions profondes ne viendront peut-etre aucun l’Etat, mais de la communaute. »

Or, l’Etat a encore son commentaire a dire, et surtout une importance capitale, reconnait Nancy Audet. « Apres la commission Laurent, l’ampleur en tache est enorme concernant le gouvernement Legault, ainsi, il ne faudrait nullement attendre. Mes centaines de pages de recommandations du rapport une Commission montrent a quel point Il existe une culture a remplacer et une desorganisation aregler », s’alarme la marraine des enfants en DPJ pour la Fondation du Centre jeunesse de Montreal.

Le travail pourrait selon elle se composer d’une foule de petites choses capables de changer reellement les choses, comme votre programme de soutien a l’emploi de l’Union des municipalites du Quebec destine aux jeunes d’la DPJ. « Cela connait de nombreuses succes, car des jeunes ne trouvent nullement seulement 1 emploi decent avec votre salaire decent, mais un reseau et de l’autonomie. Pour quelqu’un qui n’a pas de famille, ca change bien. »

Parfois aussi, c’est la famille d’accueil qui change la donne, d’ou la mission de Nancy Audet dans la serie d’aller a la rencontre de personnes qui ouvrent leur porte, et surtout leur c?ur, a Plusieurs « poques » tel i§a le fut. « Leur capacite d’adaptation m’impressionne », dit-elle avec sincerite, ainsi, a la lumiere du premier episode, on la croit concernant parole. Plusieurs garcons et des filles de tous les ages debarquent souvent avec un bagage emotionnel beaucoup plus lourd que leurs valises, ainsi, les apprivoiser demande tact et patience, la famille ignorant quelquefois nos origines de leurs peurs, de un agressivite ou de leur refus complet de s’ouvrir aux autres. En particulier a toutes les adultes, eux qui les ont si souvent trahis avant d’entrer au systeme d’une DPJ.

En revanche, n’est jamais famille d’accueil qui veut ! Meme si elles se font rares aussi que les besoins seront criants, les criteres d’evaluation demeurent particulierement severes. « Monconjoint et moi, nous voudrions etre famille d’accueil, souligne cette jeune maman, mais nous ne respectons pas nos exigences d’une maison, trop jolie. Etre famille d’accueil, c’est un eventail de vie qui exige de nombreuses sacrifices. Tu ne peux aussi gui?re faire garder votre enfant via n’importe qui : une enquete est faite dans toi, ton entourage, ton employeur, etc. »